13 sept. 2010

Bulang 2010 [suite]

Suite à mon dernier billet et à la lecture des commentaires qu'il a suscité, il fallait vraiment que je refasse un essai avec cette galette de Bulang pour ne pas en conserver un souvenir trop amer.
Ce qu'il eût fallu que je sache avant de la goûter la première fois, c'est que les vieux théiers de Bulang produisent un thé très fort, très amer.
D'ailleurs si seulement j'avais pris la peine de lire la description de ce thé sur le site web d'Essence of Tea, cette déconvenue m'aurait été épargnée :

<< From the same trees as last year's production, this tea displays many of the same characteristics. Very strong, very bitter and to be treated gently. >>

Très fort, très amer. Oui oui, je confirme. Un thé à traiter avec douceur. C'est noté.

<< This tea performs excellently when brewed with around half the leaves normally used. It does not need to be brewed strong to be enjoyed. >>

Un demi-dosage donc. C'est parti.

<< This tea is 100% ancient arbor, from 600-800 year old trees. >>

Un thé 100% arbres anciens, de 600 à 800 ans d'âge. Des photos disponibles sur le site. C'est toujours agréable d'avoir plein d'infos sur le thé que l'on s'apprête à boire !

<< The strong bitterness changes quickly in the mouth, leaving a very long huigan and a hit powerful youthful qi. >>

C'est cette phrase qui m'a motivé pour un deuxième essai : la forte amertume doit changer rapidement en bouche et laisser un très long arrière-goût. Lors de mon premier essai, j'ai effectivement pu constater une très bonne longueur en bouche, mais où dominait cette amertume écrasante. L'objectif d'aujourd'hui est donc de découvrir ce qui se cache derrière !


L'amertume ne me dérange pas, au contraire : c'est une saveur qui permet de mettre en valeur les arômes du thé et ses autres saveurs, mais pas seulement. J'aime cette saveur pour elle-même, lorsqu'elle fait partie d'un ensemble bien équilibré et harmonieux, mais pas lorsqu'elle est à ce point envahissante et qu'elle attaque "physiquement" l'ensemble de la bouche.

Je veux bien admettre que les vieux théiers de Bulang ont une amertume qui leur est propre et qui diffère de celle que l'on rencontre habituellement dans les jeunes puerh, mais j'ai du mal à concevoir qu'il y ait sur cette planète des individus qui apprécient le breuvage imbuvable que j'ai pu "déguster" lors de ma première tentative !

Je dose léger, en zhong, et j'utilise de l'eau un peu moins chaude que d'habitude. Un petit rinçage, et c'est parti.

Infusions 1 et 2 (15 à 20") : dans le couvercle du zhong, c'est assez parfumé mais je retrouve les arômes - inédits pour moi chez un jeune sheng - que j'avais décelés hier.
L'amertume est bien là, mais très faible. C'est bien la même qu'hier, mais elle est en retrait. De même que les arômes d'ailleurs, l'infusion était peut-être un peu courte pour le coup. En tout état de cause, ceux-ci sont plutôt plaisants, surtout en rétro. C'est presque agréable à boire, peut-être faut-il un peu de pratique pour appréhender cette amertume si particulière.

#3 (30") : comparé à hier, c'est tout à fait buvable. Particulier, mais buvable :)

#4 (>1') : les arômes augmentent en présence et en précision, sans pour autant que l'amertume ne soit accentuée, ou alors c'est que mon palais commence à être anesthésié !

#5 (>2') : Même constat. L'amertume ne m'est plus autant désagréable, les parfums sont là, mais de là à dire que je bois ce thé avec beaucoup de plaisir... En tout cas je ressens bien le "youthful qi" dont parlait Nada...

Une petite pause, pour refaire chauffer de l'eau et rincer ma bouche (avec un carré de chocolat, mes papilles réclament du sucre :)

#6 et 7 (>5') : + de cinq minutes d'infusion, je me rapproche de l'infusion "à la paysanne" décrite par Olivier dans son commentaire d'hier :)
La liqueur passe du jaune à l'orangé.
Les premières gorgées sont plutôt bonnes je dois bien l'avouer. C'est subtil, frais et long en bouche, et je commence à me faire à l'amertume. En revanche, sur la longueur ça devient un peu raide : l'exposition répétée et prolongée du palais et de la langue à cette amertume est difficile au bon d'un moment...

Je m'arrête là pour aujourd'hui.

Bilan sans aucune commune mesure avec la session d'hier, je découvre que l'amertume si violente de ce thé peut être apprivoisée, et il y a sans doute moyen de faire encore mieux avec d'autres expérimentations.
Une chose reste néanmoins certaine : ce n'est pas un thé que je vais boire régulièrement dans les mois à venir ; je vais certes le retester différemment, mais je pense plutôt l'oublier au moins un an ou deux pour le laisser s'assagir... (en croisant les doigts).

Cette galette est décidément pleine de surprise et n'a rien de commun avec les jeunes (ou très jeunes) sheng que j'apprécie ordinairement. Comme quoi, le monde du pu erh est extrêmement vaste et je n'en suis qu'au début de mes découvertes.

5 commentaires:

Nicolas a dit…

Beaucoup d'humour dans ce post, c'est frai.

Comme quoi une expérience mal vécue se transforme finalement en expérience de cheminement ;-)

J'ai un souvenir de mes débuts qui me fait bien rire. Un thé fumé aux fragrances de saucisson de rat (c'est l'image qui me venait à l'esprit). Véridique.

William a dit…

Salut!

Tu peux aussi essayer un blend. Par exemple un thé d'YI Wu, assez sucré: deux tiers. Le Bulang de Nada: un tiers. Le blend maison, c'est très rigolo!

Anonyme a dit…

#4 (>1') : les arômes augmentent en présence et en précision, sans pour autant que l'amertume ne soit accentuée, ou alors c'est que mon palais commence à être anesthésié !

Oui, les premières infusions sont très souvent un préliminaire aux suivantes pour les sheng.
Le palais se prépare, et décèle ensuite de belles saveurs cachées.

Il me semble que j'avais lu cela dans une lettre d'Olivier, et je confirme cette sensation d'amélioration de la perception des saveurs au fil des infusions. (Enchaîner une dégustation d'un jeune sheng avec un deuxième autre jeune sheng derrière rend l'expérience avec ce deuxième thé différente que s'il avait été dégusté en premier.)

P.-S. : non Olivier, je ne suis pas encore converti aux jeunes sheng :-)

olivier a dit…

petit commentaire mobile...

@julien
Oui en effet, les premieres infus preparent le palais aux suivantes...
Tu peux faire l experience de comparer par exemple la 4ieme infu d un the donne duquel tu aurais jette les 3 premieres sans les boires, avec la 4ieme infu apres avoir bu les 3 premieres, radicalement different ;)

@william
Mellanger du yiwu avec du bulang... c est un peu comme mettre ds son verre 1/3 de bordeau et 2/3 de cotes du rhone, ou ds son gaiwan 1/3 oolong 2/3 bi luo chun... c est peut etre rigolo mais en tant q amateur de the je trouve pas ca tres conseillable ;)

William a dit…

@Olivier

Je ne parle pas bien sur de vendre de tels mélanges, même si les grandes manufactures le font allègrement.

Je trouve que le blend est un univers intéressant, surtout si on a peu de thé chez soi, cela ouvre de nouveaux horizons, cela permet aussi de mieux connaitre les thés que l'on mélange en les confrontant directement. Une tempête dans un gaiwan!

Je pense que le Ku Cha se prête particulièrement au blend et je préfère boire un bon thé mélangé que de 'subir' un thé que je n'apprécie pas, peu importe son origine.

Pour finir, je dirais que melanger un Bulang et un Yi Wu, c'est pas pire que de faire du Shou Cha ^^