27 sept. 2011
Bulang Ji Lian
Deuxième (et dernier) puerh de la boutique Terre de Ciel, un Bulang de 2010, issu des "vieux arbres du village de Ji Lian". Je me permets de copier-coller la description que fait la boutique de cette mini galette de 100 grammes :
Récolte sur les vieux arbres du village de Ji Lian (monts Bulang), en Octobre 2010. Ces galettes ont été faites selon les méthodes traditionnelles. Peu compressée sous les pierres, pour un meilleur vieillissement dans nos régions. Une toute petite production.
Doux, rond, et frais, ce thé doré et limpide est un classique des Pu'Er d'automne. Une agréable sensation de fraîcheur persiste longtemps en bouche.
C'est un très bon thé pour une initiation au Pu'Er vert.
Une galette à priori fort sympathique, effectivement peu compressée, et une odeur "classique" de jeune puerh avec ce petit côté incisif que j'ai déjà rencontré dans d'autres thés de la région de Bulang.
Les toutes premières infusions sont d'emblée d'un orange assez pâle (difficile de rendre fidèlement les couleurs en photo avec un éclairage 'ampoule'). La texture de la liqueur est agréable quoi qu'un peu sèche et légèrement accrocheuse, mais au final relativement agréable en bouche.
Au niveau des arômes je ne suis pas emballé plus que cela, j'ai l'impression qu'une acidité vient perturber l'ensemble et que le rendu final est plutôt bancal. Il y a bien une petite note réglissée (ou quelque chose dans le genre) assez agréable sur la finale, mais pour le reste je ne suis pas convaincu.
La sensation de fraîcheur évoquée par Terre de Ciel est bien réelle, mais j'ai l'impression qu'elle est davantage due au jeune âge et à la vivacité de ce thé qu'à son profil aromatique un peu terne. La seule façon d'obtenir quelque chose de vraiment consistant en bouche est d'infuser beaucoup plus long, mais du coup on se retrouve avec une amertume vraiment soutenue et très typée Bulang, ce qui me fait dire que justement non, ce n'est pas un très bon thé pour une initiation au puerh vert. L'alternative n'est donc pas vraiment palpitante : soit doux et "fade", soit consistant et relativement amer. Trouver le juste milieu est assez aisé (il suffit de pousser légèrement les infusions) mais le résultat est là aussi moyen à mon goût, surtout au niveau des arômes, trop peu présents. Très en dessous de la galette Youle de la même boutique.
Bref, un puerh "bien mais pas top" comme dirait l'autre dans le film :)
> Un échantillon de ce Bulang au premier qui me donne le titre du film en question !
24 sept. 2011
Table à thé
Depuis que je m'adonne un peu "sérieusement" à la pratique du thé, je m'intéresse de plus en plus à la céramique. Je n'ai pas de pièces de très grande valeur dans ma petite collection d'ustensiles, mais là ne réside pas l'essentiel à mes yeux. Je ne serai probablement jamais de ceux qui sont capables de déceler les subtiles différences entre deux infusions d'un même thé dans deux terres distinctes, ni de ces passionnés spécialistes des céramiques japonaises ou chinoises. Cela ne m'empêche pas de beaucoup apprécier les objets du thé, aussi simples soient-ils : manipuler une petite théière, même si sa valeur marchande est dérisoire, la voir se patiner au fil du temps, l'utiliser quotidiennement... des objets simples, des gestes simples, une pratique simple : un plaisir simple (mais pas simpliste pour autant).
Ce qui m'intéresse dans la céramique, c'est le côté artisanal de la chose : partir d'une boule de terre et parvenir à fabriquer une théière, une tasse ou un bol a quelque chose de fascinant qui me fait songer à ces temps pas si immémoriaux que ça où les objets que l'homme utilisait avaient forcément été fabriqués de façon artisanale (je vous conseille à ce propos la lecture de la saga préhistorique "Les enfants de la Terre"). Pas de gourdes en plastique, point de bouteilles en verre ou de Brita, on stockait l'eau dans des outres en peau de chèvre ou en vessie de mammouth. Sans remonter aussi loin, je me sens un peu nostalgique du temps (sans doute parce que je n'ai pas connu son âpreté, me direz-vous) où les hommes fabriquaient eux-même ce dont ils avaient besoin pour (sur)vivre.
C'est peut-être un peu pour cette raison d'ailleurs que je me sens attiré par les poteries un peu "roots", "nature" : les matières brutes, l'asymétrie, les cuissons dessinant des motifs aléatoires et révélant les irrégularités de la matière. Y aurait-il un engouement actuel pour ce style de réalisations ? J'ai eu l'occasion de voir "en vrai" quelques pièces de David Louveau ou de Petr Novak (et d'en acquérir quelques unes), c'est exactement ce dont je parle : un parti pris orienté matière brute, une cuisson au feu de bois, un rendu irrégulier et aléatoire, des pièces uniques. Je digresse, revenons au sujet.
On m'a offert il y a quelques mois une séance d'initiation au tournage dans l'atelier d'Hélène Morbu, céramiste, au cours de laquelle j'avais pu mesurer la difficulté de cet art où le moindre faux mouvement peut tout faire écrouler en moins d'une seconde. Au bout de 2 heures d'effort, j'avais tout de même pu faire un petit pot en faïence, et je dois dire que ça m'avait bien plu.
Pour une autre occasion, j'ai de nouveau eu en cadeau des séances chez cette même céramiste et, bien que la perspective de tourner une jarre à puerh m'enthousiasmait au plus haut point, l'idée d'une table à thé me trottait dans la tête depuis un bon moment déjà. A tel point d'ailleurs que j'avais une idée assez précise de ce que je voulais faire et que le projet "jarre" a été repoussé. Inspiré par le superbe rendu du grès noir chamotté des pots d'Hélène Morbu (voir Collections / Pots sur son site), par quelques tables à thé aperçues ici ou là et par le thème de l'eau, j'avais en tête une vision assez définie de mon objectif. J'en ai fait une maquette en carton, que j'ai soumise à Hélène. Banco, c'est parti, je vais me fabriquer moi-même (un peu aidé tout de même) une table à thé en grès.
Cahier des charges : table carrée d'une trentaine de centimètres de côté, d'environ 5 centimètres de hauteur, soit un volume utile de plus de 4 litres (amplement suffisant pour une dégustation même prolongée), plateau supérieur avec quelques trous d'écoulement, et en son centre le symbole 水 - (shuǐ : eau) en relief. Cet idéogramme n'est pas là (que) pour décorer, il est destiné à éviter que mes théières ne baignent dans l'eau. Surélevées de quelques millimètres, les théières pourront laisser l'eau s'écouler sous elles : plus aucun risque de marques de stagnation sur le bas de leurs parois. J'ai longuement hésité sur le motif, envisagé plusieurs alternatives géométriques, mais le symbole de l'eau me semble approprié pour cette table destinée à la recueillir, et il faut bien rappeler que l'eau est un élément indispensable à toute vie, ainsi qu'un des paramètres les plus importants pour la préparation du thé. De plus, ce qui me plaît avec ces tables à thé, c'est quand même de jouer avec l'eau, d'arroser mes théières, de les faire déborder, de gansouiller comme dirait ma grand-mère.
Passons aux choses sérieuses: première session de travail (deux heures) :
Nous avons prélevé de gros morceaux de grès noir (brun rouge avant cuisson), puis nous les avons étalés avec un gros rouleau sur des planches pour façonner des plaques de l'épaisseur voulue (8mm). Nous avons réalisé 5 plaques au total :
- 1 plaque pour le fond,
- 2 plaques pour les 4 côtés (2 côtés par plaque),
- 1 petite plaque pour les éléments placé à l'intérieur de la table qui supporteront le plateau supérieur,
- 1 grande plaque (la plus grande) pour le plateau et son "cadre", celle-ci étant un peu moins épaisse que les autres.
Ne pas oublier :
- de retourner les plaques pour ne pas qu'elles adhèrent trop fortement sur les planches de bois suite aux passages du rouleau (le côté opposé pourrait se craqueler en séchant).
- de prendre en considération les 8% de réduction à la cuisson lors des prises de mesure.
J'ai souhaité faire des inclusions de grès blanc sur le plateau, aux endroits où les trous d'écoulement seront percés (ces inclusions symboliseront des gouttes d'eau). Pour ce faire, c'est beaucoup plus simple que ce que j'imaginais : il suffit de former des petites boules et de les aplatir pour former des petits disques de la dimension souhaitée. Il ne reste plus alors qu'à les positionner sur le plateau aux emplacements désirés, puis de les "inclure" dans la matière en passant un coup de rouleau par dessus.
Voilà, c'est fini pour cette première session, on a superposé les plaques (intercalées par les planches qui les supportent) pour 3 jours de séchage dans l'atelier. Finalement, un jour de séchage suffira, les plaques seront alors recouvertes de plastiques pour ne pas qu'elles durcissent trop.
Deuxième session de travail (deux heures) :
Grattage des côtés extérieurs des montants pour faire apparaître le grain de la chamotte (opération assez délicate, déléguée en grande partie à Hélène qui a davantage le coup de main). L'intérieur et le fond devront au contraire être aussi lisse que possible pour garantir une tenue optimale de l'émail, à des fins d'étanchéité.
Découpe du fond et des montants aux bonnes dimensions, puis assemblage de la "boîte" à la barbotine. Mine de rien, ça prend beaucoup de temps : il faut hachurer les parties à coller, les enduire de barbotine, assembler. Dans la foulée, faire des petits boudins de terre et les pousser dans les points de jonction (intérieur et extérieur). Ensuite, gratter ce qui dépasse avec des petits outils en bois, ajuster, lisser... les finitions quoi. Pour corser un peu le tout, il faut savoir que la barbotine, ça colle très très vite : il vaut mieux ne pas se louper.
On utilise également un spray pour pulvériser de l'eau quand la terre sèche trop vite : il faut que la consistance des morceaux à coller soit idéale (la "consistance cuir" : assez ferme pour que le doigt ne s'enfonce plus, aspect et consistance souple du cuir) pour que le collage soit efficace (et étanche, ce qui est quand même l'objectif dans le cas présent). La boîte est maintenant terminée, et mise sous plastique en attendant la séance suivante.
Troisième session de travail (deux heures) :
Découpe et collage des éléments intérieurs destinés à supporter le plateau amovible, grattage (pour faire apparaître la chamotte) et découpe de la partie supérieure (le tour du "cadre" et le plateau amovible, sans oublier les côtés), perçage des trous d'écoulement, puis collage et ajustement du cadre.
Le collage du cadre n'a pas été une mince affaire : difficile de lisser les points de jonction situés à l'intérieur de la "boîte" maintenant en partie recouverte !
Finalement, j'ai abandonné l'idée du symbole 水 : je suis tellement conquis par le rendu du plateau une fois percé et gratté que j'ai peur que ce symbole ne vienne tout gâcher.
Dernières petites finitions avant un séchage lent sur plusieurs jours (d'abord sous plastique, puis à l'air libre).
Quatrième session (trois quarts d'heure) :
Hélène a cuit la table et le plateau dans son four électrique à 980°C pendant une dizaine d'heures, cuisson au cours de laquelle le plateau a légèrement ondulé.
Il ne reste plus qu'à émailler l'intérieur de la table : il "suffit" de la remplir d'émail liquide, de la faire basculer de gauche à droite et d'avant en arrière pour que toute la surface interne soit couverte puis de la vider (sans trop en faire couler aux endroits qui ne sont pas sensés être vernis...).
Suite à ça, j'ai gratté les coulures avec un outil en bois pour avoir une épaisseur à peu près homogène, puis enlevé l'émail aux endroits non désirés à la brosse à dent et à l'éponge.
L'émaillage des inclusions de grès blanc s'est fait au pinceau. J'ai préféré émailler ces parties car le thé, ça tache. Autant sur le noir ça ne se verra pas trop, autant ces fines parties de grès blanc auraient rapidement bruni sans cette couche de protection.
Voilà, c'est presque fini, il ne reste plus qu'à cuire une seconde fois, en croisant les doigts pour que la table n'explose pas au cours de cette deuxième cuisson durant laquelle le grès va encore bouger.
C'est cuit !
La deuxième cuisson (une dizaine d'heures également, mais avec quelques 300°C supplémentaires) est terminée, et a miraculeusement redressé le plateau un peu gondolé par la première fournée.
Tout est droit (à peu près), tout est nickel, sauf que le plateau est un peu trop surélevé par rapport au cadre, je devrais limer un peu les supports si je veux que le plateau soit bien stable et de niveau.
Inauguration !
Fabienne Verdier, "Brin d'herbe" |
Ce qui m'intéresse dans la céramique, c'est le côté artisanal de la chose : partir d'une boule de terre et parvenir à fabriquer une théière, une tasse ou un bol a quelque chose de fascinant qui me fait songer à ces temps pas si immémoriaux que ça où les objets que l'homme utilisait avaient forcément été fabriqués de façon artisanale (je vous conseille à ce propos la lecture de la saga préhistorique "Les enfants de la Terre"). Pas de gourdes en plastique, point de bouteilles en verre ou de Brita, on stockait l'eau dans des outres en peau de chèvre ou en vessie de mammouth. Sans remonter aussi loin, je me sens un peu nostalgique du temps (sans doute parce que je n'ai pas connu son âpreté, me direz-vous) où les hommes fabriquaient eux-même ce dont ils avaient besoin pour (sur)vivre.
C'est peut-être un peu pour cette raison d'ailleurs que je me sens attiré par les poteries un peu "roots", "nature" : les matières brutes, l'asymétrie, les cuissons dessinant des motifs aléatoires et révélant les irrégularités de la matière. Y aurait-il un engouement actuel pour ce style de réalisations ? J'ai eu l'occasion de voir "en vrai" quelques pièces de David Louveau ou de Petr Novak (et d'en acquérir quelques unes), c'est exactement ce dont je parle : un parti pris orienté matière brute, une cuisson au feu de bois, un rendu irrégulier et aléatoire, des pièces uniques. Je digresse, revenons au sujet.
On m'a offert il y a quelques mois une séance d'initiation au tournage dans l'atelier d'Hélène Morbu, céramiste, au cours de laquelle j'avais pu mesurer la difficulté de cet art où le moindre faux mouvement peut tout faire écrouler en moins d'une seconde. Au bout de 2 heures d'effort, j'avais tout de même pu faire un petit pot en faïence, et je dois dire que ça m'avait bien plu.
Pour une autre occasion, j'ai de nouveau eu en cadeau des séances chez cette même céramiste et, bien que la perspective de tourner une jarre à puerh m'enthousiasmait au plus haut point, l'idée d'une table à thé me trottait dans la tête depuis un bon moment déjà. A tel point d'ailleurs que j'avais une idée assez précise de ce que je voulais faire et que le projet "jarre" a été repoussé. Inspiré par le superbe rendu du grès noir chamotté des pots d'Hélène Morbu (voir Collections / Pots sur son site), par quelques tables à thé aperçues ici ou là et par le thème de l'eau, j'avais en tête une vision assez définie de mon objectif. J'en ai fait une maquette en carton, que j'ai soumise à Hélène. Banco, c'est parti, je vais me fabriquer moi-même (un peu aidé tout de même) une table à thé en grès.
Cahier des charges : table carrée d'une trentaine de centimètres de côté, d'environ 5 centimètres de hauteur, soit un volume utile de plus de 4 litres (amplement suffisant pour une dégustation même prolongée), plateau supérieur avec quelques trous d'écoulement, et en son centre le symbole 水 - (shuǐ : eau) en relief. Cet idéogramme n'est pas là (que) pour décorer, il est destiné à éviter que mes théières ne baignent dans l'eau. Surélevées de quelques millimètres, les théières pourront laisser l'eau s'écouler sous elles : plus aucun risque de marques de stagnation sur le bas de leurs parois. J'ai longuement hésité sur le motif, envisagé plusieurs alternatives géométriques, mais le symbole de l'eau me semble approprié pour cette table destinée à la recueillir, et il faut bien rappeler que l'eau est un élément indispensable à toute vie, ainsi qu'un des paramètres les plus importants pour la préparation du thé. De plus, ce qui me plaît avec ces tables à thé, c'est quand même de jouer avec l'eau, d'arroser mes théières, de les faire déborder, de gansouiller comme dirait ma grand-mère.
Toi aussi, apprends à dessiner le caractère shuǐ grâce à Wikipédia |
Passons aux choses sérieuses: première session de travail (deux heures) :
Nous avons prélevé de gros morceaux de grès noir (brun rouge avant cuisson), puis nous les avons étalés avec un gros rouleau sur des planches pour façonner des plaques de l'épaisseur voulue (8mm). Nous avons réalisé 5 plaques au total :
- 1 plaque pour le fond,
- 2 plaques pour les 4 côtés (2 côtés par plaque),
- 1 petite plaque pour les éléments placé à l'intérieur de la table qui supporteront le plateau supérieur,
- 1 grande plaque (la plus grande) pour le plateau et son "cadre", celle-ci étant un peu moins épaisse que les autres.
Découpe des plaques, au couteau |
Ne pas oublier :
- de retourner les plaques pour ne pas qu'elles adhèrent trop fortement sur les planches de bois suite aux passages du rouleau (le côté opposé pourrait se craqueler en séchant).
- de prendre en considération les 8% de réduction à la cuisson lors des prises de mesure.
J'ai souhaité faire des inclusions de grès blanc sur le plateau, aux endroits où les trous d'écoulement seront percés (ces inclusions symboliseront des gouttes d'eau). Pour ce faire, c'est beaucoup plus simple que ce que j'imaginais : il suffit de former des petites boules et de les aplatir pour former des petits disques de la dimension souhaitée. Il ne reste plus alors qu'à les positionner sur le plateau aux emplacements désirés, puis de les "inclure" dans la matière en passant un coup de rouleau par dessus.
Voilà, c'est fini pour cette première session, on a superposé les plaques (intercalées par les planches qui les supportent) pour 3 jours de séchage dans l'atelier. Finalement, un jour de séchage suffira, les plaques seront alors recouvertes de plastiques pour ne pas qu'elles durcissent trop.
Deuxième session de travail (deux heures) :
Grattage des côtés extérieurs des montants pour faire apparaître le grain de la chamotte (opération assez délicate, déléguée en grande partie à Hélène qui a davantage le coup de main). L'intérieur et le fond devront au contraire être aussi lisse que possible pour garantir une tenue optimale de l'émail, à des fins d'étanchéité.
Le plateau et son cadre, avec les inclusions de grès blanc, avant découpe et perçage. Le grès n'a pas encore été "gratté" pour faire ressortir la chamotte. |
Découpe du fond et des montants aux bonnes dimensions, puis assemblage de la "boîte" à la barbotine. Mine de rien, ça prend beaucoup de temps : il faut hachurer les parties à coller, les enduire de barbotine, assembler. Dans la foulée, faire des petits boudins de terre et les pousser dans les points de jonction (intérieur et extérieur). Ensuite, gratter ce qui dépasse avec des petits outils en bois, ajuster, lisser... les finitions quoi. Pour corser un peu le tout, il faut savoir que la barbotine, ça colle très très vite : il vaut mieux ne pas se louper.
On utilise également un spray pour pulvériser de l'eau quand la terre sèche trop vite : il faut que la consistance des morceaux à coller soit idéale (la "consistance cuir" : assez ferme pour que le doigt ne s'enfonce plus, aspect et consistance souple du cuir) pour que le collage soit efficace (et étanche, ce qui est quand même l'objectif dans le cas présent). La boîte est maintenant terminée, et mise sous plastique en attendant la séance suivante.
Préparation de l'assemblage à la barbotine : hachurage des points de contact. |
Troisième session de travail (deux heures) :
Découpe et collage des éléments intérieurs destinés à supporter le plateau amovible, grattage (pour faire apparaître la chamotte) et découpe de la partie supérieure (le tour du "cadre" et le plateau amovible, sans oublier les côtés), perçage des trous d'écoulement, puis collage et ajustement du cadre.
Plateau découpé, percé et gratté. |
Le collage du cadre n'a pas été une mince affaire : difficile de lisser les points de jonction situés à l'intérieur de la "boîte" maintenant en partie recouverte !
Finalement, j'ai abandonné l'idée du symbole 水 : je suis tellement conquis par le rendu du plateau une fois percé et gratté que j'ai peur que ce symbole ne vienne tout gâcher.
Envers du cadre, avant collage sur la "boîte". |
Dernières petites finitions avant un séchage lent sur plusieurs jours (d'abord sous plastique, puis à l'air libre).
Prochaines étapes : séchage et cuisson. |
Quatrième session (trois quarts d'heure) :
Hélène a cuit la table et le plateau dans son four électrique à 980°C pendant une dizaine d'heures, cuisson au cours de laquelle le plateau a légèrement ondulé.
Il ne reste plus qu'à émailler l'intérieur de la table : il "suffit" de la remplir d'émail liquide, de la faire basculer de gauche à droite et d'avant en arrière pour que toute la surface interne soit couverte puis de la vider (sans trop en faire couler aux endroits qui ne sont pas sensés être vernis...).
Suite à ça, j'ai gratté les coulures avec un outil en bois pour avoir une épaisseur à peu près homogène, puis enlevé l'émail aux endroits non désirés à la brosse à dent et à l'éponge.
L'émaillage des inclusions de grès blanc s'est fait au pinceau. J'ai préféré émailler ces parties car le thé, ça tache. Autant sur le noir ça ne se verra pas trop, autant ces fines parties de grès blanc auraient rapidement bruni sans cette couche de protection.
Voilà, c'est presque fini, il ne reste plus qu'à cuire une seconde fois, en croisant les doigts pour que la table n'explose pas au cours de cette deuxième cuisson durant laquelle le grès va encore bouger.
C'est cuit !
La deuxième cuisson (une dizaine d'heures également, mais avec quelques 300°C supplémentaires) est terminée, et a miraculeusement redressé le plateau un peu gondolé par la première fournée.
Tout est droit (à peu près), tout est nickel, sauf que le plateau est un peu trop surélevé par rapport au cadre, je devrais limer un peu les supports si je veux que le plateau soit bien stable et de niveau.
Inauguration !
Quelques photos vite fait, mais bon vous aurez sans doute l'occasion de la revoir, cette table en grès. Au passage, vous pouvez en profiter pour admirer cette tasse à puerh de David Louveau, qui se marie très bien avec cette table et qui, surtout, fait des merveilles avec le puerh cru que j'ai choisi pour cette inauguration...
Et en plus, elle est étanche ! (ce qui n'est pas négligeable)...
17 sept. 2011
Youle - Yan Nuo 2011
Cette très belle petite galette de 250g vient d'une boutique en ligne dénichée par EDP au hasard de ses déambulations sur le web du thé. La boutique des Thés Pu'er Terre de Ciel est alimentée par le travail de deux françaises, Aude Frère et Dominique Charriez, qui sont également à l'initiative de la Galerie Yunnan (Vaucluse). Je vous laisse visiter ces 2 liens pour en savoir un peu plus, mais pour résumer, ces deux amies ont attrapé le virus du puerh à l'occasion d'un voyage dans le Yunnan, et elles proposent de goûter les thés qu'elles ont sélectionné et fait conditionner là-bas.
Cette galette "Youle" est issue de vieux arbres du village de Yan Nuo, dans la montagne de Youle (Six Famous Mountains), récolte fin février 2011 .
"Ces galettes ont été faites selon les méthodes traditionnelles et pressées soigneusement sous les pierres le 6 Avril 2011. Papier d'emballage Dai de fabrication artisanale, design fait par Aude Frère et Dominique Charriez, imprimé à Jinhong."
Il est indéniable que le design est superbe. Je suis conquis par ce papier "Dai" (quoique vraiment très fin) et surtout par le dessin (à l'encre ?) proposé par Aude et Dominique. Bon, l'habit ne fait pas le moine et un chouette emballage masque peut-être un thé très moyen, mais il n'y a qu'une seule façon d'en être certain, c'est de passer à la dégustation !
Une fois déballée, la galette laisse échapper une odeur de très jeune puerh, surtout axée dans le végétal frais. Aucune trace des notes de fumée évoquées sur le site, peut-être que celles-ci ne sont délivrées que lors des infusions initiales. On peut apercevoir de beaux bourgeons sur cette galette effectivement peu compacte, mêlés à de petites feuilles ou morceaux de feuilles relativement sombres. Il est temps d'en prélever quelques grammes (avec le pic à puerh glissé dans la commande, merci les filles !) et de les placer dans mon shiboridashi, glissé dans ma valise pour ce week-end à la campagne.
Deux rinçages express, première infusion (une poignée de secondes) : j'obtiens une liqueur très claire, mais tirant tout de même légèrement sur l'orangé (difficile de déterminer la vraie couleur dans cette tasse non blanche). Je ne détecte pas la petite note de fumée promise, c'est dommage parce que c'est quelque chose que j'apprécie bien sur les jeunes sheng (dans la limite du raisonnable). A part ça, c'est très frais, majoritairement végétal et bien structuré, ça tient bien en bouche, rien à dire c'est vraiment pas mal. Pas d'amertume, très légère astringence qui vient relever la relative monotonie des arômes.
Pour la suite, je confirme que c'est un bon petit puerh, sans doute pas le meilleur "puerh de l'année" qu'il m'ait été donné de goûter, mais en poussant légèrement les infusions - surtout avec le dosage plutôt conséquent pour lequel j'ai opté - il est assez facile d'obtenir une liqueur qui tient vraiment bien la route, consistante, épaisse sans être lourde, très végétale mais pleine de relief, longue et fine. Il ne réagit cependant pas très bien aux infusions "trop" poussées : la liqueur devient très sèche, et l'augmentation de l'astringence - qui n'est pas gênante en soi - n'est pas accompagnée d'une montée en puissante des arômes, ce qui déséquilibre fortement l'ensemble.
Bref, je suis ravi d'avoir pu tester ce petit puerh fort sympathique, peut-être un peu plus capricieux que d'autres, mais fort honorable pour une consommation quotidienne. Je réviserai ou nuancerai peut-être mon jugement après une dégustation en théière, affaire à suivre.
14 sept. 2011
Kama-iri cha de Ureshino
Ouverture du cinquième sachet de la sélection 2010 de Florent (boutique Thés du Japon) : un Kama-iri cha de Ureshino (ville du département de Saga, sur l'île de Kyûshû), cultivar Yabukita.
Le nom exact est Kama-iri-sei Tamaryoku-cha, abrégé en Kama-iri cha. Tout ça pour dire que le Kama-iri cha est une sorte de Tamaryoku-cha, mais pour une explication plus complète, je ne peux pas mieux faire que de copier-coller la description de ce thé trouvée sur le site de la boutique (j'espère que Florent me pardonnera cet emprunt) :
Le département de Saga est particulièrement connu pour son tamaryoku-cha. Il existe deux types de tamaryoku-cha. Le plus courant est celui dont l'oxydation est stoppée à l'étuvée (méthode japonaise), mais celui dont l'oxydation est stoppée à la poêle (méthode chinoise) est aujourd'hui très rare. Et les produits de qualité le sont encore plus.
Ce thé est l'un de ces très rares kama-iri cha. Leur principale qualité est un parfum particulier appelé kama-ka. Ce parfum évoque le marron grillé, puis des nuances de pinède se font plus présentes au fil des infusions. Ce parfum est envoutant, très présent, et complètement différent de ce qu'offrent les tamaryoku-cha à l'étuvée, les sencha, et autres gyokuro. La liqueur dorée de ce précieux thé est légère, affichant un bon équilibre entre douceur et astringence, très désaltérante. Il laisse néanmoins un subtil arrière goût doux typique des thés japonais, en particulier ceux de Kyûshû. A la différence des sencha et tamaryoku-cha à l'étuvée, ce thé vous fais profiter d'au moins 3 infusions. Ce thé surprend dans le meilleur des sens.
Les bons kama-iri cha sont de nos jours extrêmement rares, il s'agit d'un type de thé finalement méconnu, tombé malheureusement un peu dans l'oublie. Témoignage parfait de la diversité du thé japonais, le kama-iri cha mérite une réévaluation à la hausse.
Du coup cette description, en plus d'être extrêmement instructive, m'a donné vraiment soif, il est plus que temps d'ouvrir ce sachet, beaucoup plus ventru et volumineux que ses prédécesseurs. La méthode chinoise de "kill-green" (à la poêle / wok), permettrait-elle de produire des feuilles plus volumineuses qu'une étuvation à la japonaise ? On dirait bien.
Les feuilles, d'un beau vert profond, n'ont effectivement pas la forme "aiguillesque" des sencha précédents. L'odeur est fraîche, végétale et riche en parfums, et il y a en effet comme un air de famille avec certains thés verts chinois (Bi Luo Chun...).
Je ne vais pas réinventer l'eau chaude, j'opte donc pour les paramètres proposés sur le site : 3 infusions avec 4g de thé (dans mon shiboridashi, car ma théière est restée au bureau où elle travaille chaque matin), 70ml d'eau (de plus en plus chaude : 85/90/95°C) et des temps assez classiques (1', 30", 1').
Concrètement, vu que tous mes gadgets sont restés au bureau, je vais tout faire au jugé en me basant sur des repères visuels, sauf pour les durées d'infusion : je vais utiliser un petit sablier d'une minute, très pratique.
L'infusion 1 est relativement claire et limpide, dotée d'une fine astringence très agréable. Je n'y retrouve pas le marron grillé ni la pinède, mais plutôt un petit goût de fruit sec (noix ?), confortablement installé sur un tapis de verdure très rond et délicat. La texture est souple, veloutée, c'est long et fin en bouche, miam.
L'infusion 2, encore plus translucide, n'a décidément rien à voir avec les eaux boueuses de feu mon fukamushi sencha de Kagoshima ! La liqueur est toujours aussi fine en bouche, avec pourtant une forte présente, c'est frais et ça se boit tout seul. Contrairement aux feuilles sèches, ce n'est pas aussi typé "thé vert chinois" que j'aurais pu le penser : c'est clairement un thé japonais.
Je dois bien avouer qu'à l'aveugle, je serais sans doute bien incapable de faire la différence entre ce Kama-iri cha et un sencha étuvage standard... Quoi qu'il en soit, c'est très bon, et ces 2 premières liqueurs m'ont vraiment frappé par leur pureté.
L'infusion 3 est moins parfumée mais super agréable, très fraîche et d'une pureté incomparable. Ça se boit vraiment bien, c'est très accessible, en tout cas pour moi : plaisir immédiat, j'adore.
Conclusion : effectivement, les Kama-iri cha "méritent une réévaluation à la hausse", en tout cas cela ne fait aucun doute pour celui-ci. Une très belle découverte, le sachet de 100g ne va pas faire long feu...
11 sept. 2011
Shi'er Xiansheng - Yiwu - 2006
Cadeau de mon voisin : la fin d'une galette assez prestigieuse, la Shi'er Xiansheng (12 gentlemen) "Yiwu" de 2006, qu'il avait achetée à Nada il y a maintenant quelques années. A l'occasion d'une petite dégustation entre voisins, j'observais une de ses jarres, en me demandant ce qu'elle pouvait bien renfermer comme trésor, et je me suis vu offrir le reste de cette galette, qui trônait dans cette jarre, et qui l'embaumait d'une façon démentielle. J'ai essayé (bien faiblement) de refuser ce présent, mais j'ai été forcé (bien contre mon gré vous l'imaginez) d'accepter ce bout de galette au motif qu'il en avait un autre exemplaire, intact, dans ses placards.
Donc, un grand merci encore à mon voisin !
L'odeur est toujours aussi incroyable. Ça sent vraiment le très, très bon puerh. Ce que je préfère dans les puerh, ce registre que j'appelle boisé/épicé, est ici formidable et me fait saliver instantanément. Ajoutez à cela des notes animales (vieux cuirs) et une très forte concentration des arômes, vous aurez une idée de ce que j'ai sous le nez.
Je prélève 6g de thé (les miettes + un petit morceau qui s'est détaché de la galette), que je place dans ma petite théière de 8cl.
Deux rinçages flash, et première infusion rapide (10 à 15"). La liqueur a vraiment tout pour plaire : de la consistance et de l'épaisseur - à la manière d'un "bon gros puerh" - qui font que l'on a une très bonne assise en bouche, du relief apporté par une excellente amertume, et le tout qui débouche sur une longue finale vraiment fine et complexe. C'est à la fois doux et puissant, onctueux et "charpenté", très parfumé... bref, c'est délicieux.
La suite a été du même tonneau : j'ai enchaîné les infusions en savourant chaque gorgée, je ne vais pas m'étendre davantage et aligner les superlatifs, ce fut une superbe dégustation d'un excellent puerh.
Les vacances sont finies pour moi, je reprends le chemin du bureau demain. Ce Shi'er Xiansheng m'a remotivé, la rentrée s'annonce bien !
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