Quatrième sachet de la sélection de Florent de 2010, un sencha de Kagoshima (la préfecture à l'extrême sud-ouest du Japon). C'est un sencha de cultivar Asatsuyu issu de la première récolte du printemps 2010.
Le cultivar Asatsuyu est célèbre pour la couleur très foncée de ses liqueurs, leur fort goût végétal et pour leur douceur presque excessive. Enfin bon, je ne fais que reformuler ce que Florent explique sur son site, je n'y connais pas grand chose en cultivar. D'après ce que j'ai compris, celui-ci est assez particulier, et on ne peut pas y rester insensible : on adore ou on déteste.
Cet Asatsuyu de Kirishima sélectionné par Florent est cependant - toujours d'après lui - une entrée en douceur dans l'univers Asatsuyu : il est supposé être doux et léger, et Florent conseille à ce titre de l'infuser un peu plus fortement. Bon, il est maintenant temps de l'ouvrir, ce sachet !
Les petits fragments de feuilles renfermés par le sachet indiquent clairement qu'il s'agit bel et bien d'un fukamushi sencha, autrement dit un sencha "très" étuvé, donc davantage manipulé, et au final : beaucoup de miettes. On retrouve tout de même des feuilles plus grandes dans une gamme de verts assez sombres, rehaussés ici et là par une quelques brindilles ou bouts de feuilles d'un vert beaucoup plus clair et lumineux.
L'odeur dégagée par les feuilles sèches est de premier abord très végétale, presque "marine" / iodée. En réchauffant doucement les feuilles avec son souffle, le parfum de la douce torréfaction vient s'ajouter à la grosse dominante verte : le rendu global est vraiment intéressant. Ca me fait un peu penser (de mémoire, il faudrait vérifier) au Nori, les feuilles d'algues utilisées pour faire des makis...
4 grammes de feuilles dans ma théière, de l'eau bouillie quelques instants, et c'est parti pour l'infusion 1 (80 ml / 75°C / 70 secondes). Liqueur d'un très beau vert profond et lumineux, assez surprenante en bouche : à la fois très douce mais pourtant dotée de parfums presque "anguleux", très précis. J'ai une impression de mélange de douceur, d'amertume et d'un petit quelque chose de salé, le tout sur une texture relativement épaisse. La dominante végétale est une vraie réussite. N'ayant jamais mangé de fèves, je suis bien incapable de me prononcer sur le fameux goût de fève de cet Asatsuyu. En revanche, le petit goût de haricot, je l'ai bien repéré.
Infusion 2 à un peu moins de 75°C, la plus courte possible (ce qui signifie au moins 30 secondes car les miettes de feuilles ont une fâcheuse tendance à boucher le filtre de ma théière). La liqueur est beaucoup plus trouble, d'un splendide vert foncé. Toujours aussi intéressant en bouche. Contrairement à ce que j'ai pu lire à propos de ce cultivar Asatsuyu, je ne trouve pas que le rendu soit "douceâtre", loin de là : cette deuxième infusion m'a beaucoup plu par sa franchise, sa fraîcheur et sa vivacité, et j'ai apprécié une certaine rugosité (texture chargée), ainsi qu'une assise solide propice à l'installation d'une bonne longueur en bouche.
L'aspect de ce genre de liqueurs (très troubles et pleines de particules formant une sorte de vase dans le fond de la tasse) est maintenant un peu moins déroutant pour moi, et à vrai dire peu engageant pour un néophyte, mais une fois en bouche, on a vite fait de les adopter pour de bon. Je dois tout de même avouer que j'ai plutôt tendance à jeter les dernières gouttes... c'est purement psychologique.
Infusion 3 (entre 75 et 80°C, 1'30) : même dynamique, même texture que l'infusion 2, mais en moins parfumée, un peu moins séduisante, et encore plus trouble : je ne distingue presque plus le fond de la tasse ! Bien que toujours agréable à siroter, cette troisième infusion était peut-être de trop. En même temps, je me connais : je suis certain que je ne pourrais pas me résoudre à ne faire que deux infusions avec ce sencha. Je ferais donc varier légèrement les paramètres d'infusion lors des prochains essais avec ce thé pour essayer d'obtenir une "bonne" troisième liqueur.
Encore un très bon sencha de la sélection de Florent pour Thés du Japon, je m'attendais à quelque chose de très doux voire douceâtre, ce n'est pas le cas (en tout cas à mon goût et infusé comme je l'ai fait). C'est un thé frais et subtil, bref, encore un thé qui me plaît beaucoup. Moins facile d'accès - en ce qui me concerne - que les sencha / tamaryokucha précédents, je le boirai tout de même avec beaucoup de plaisir.
8 commentaires:
Très joli compte-rendu. J'ai la version 2011 à la maison mais pas encore entamée.
Généralement, la douceur est plus mise en valeur avec de l'eau fraîche et des infusions longues que l'inverse.
Bon weekend plein de verdures.
PS : jolie tasse !!
Ah...Grand bonheur que ce thé...Il ne présente pas la douceur douceâtre du cultivar asatsuyu peut-être, que j'ai retrouvée sur un autre asatsuyu, mais celui-ci est plus complexe, subtil. Très végétal, avec une pointe poivrée. J'adore ces liqueurs foncées, troubles, "boueuses" ? Et moi j'adore le fond de tasse, mi liquide, mi solide...
Je suis impatient d'ouvrir le millésime 2011 de ce cultivar dans la sélection de Florent (effectivement irréprochable).
Beau CR Sébastien, et jolie tasse !
"Boueux" pas mal comme adjectif. En tout cas, il décrit très bien le tamaryokucha que je suis en train de boire (3ème infusion). Bien trouvé.
Il vient d'où ce tamaryokucha ?
Très joli dans ta tasse Sendaï !
Moi je suis sur un Sayamakaori de Hiruma-san, préparé dans ma petite Yamada So (10 cl). Pour le moins marécageux aussi...d'une longueur...
Oops, je me suis trompé de sachet hier, en fait la photo est le Yutaka Midori d'O-Cha 2011, un fukamushi shincha vraiment très fragmenté (par rapport aux fuka de Florent notamment).
Je suis en ce moment sur le tamaryokucha, il vient de la boutique Hakoniwado.
Bien vu pour le petit côté poivré Lionel, j'étais passé à côté depuis le début.
C'est vraiment étrange, je bois ce sencha tous les matins depuis 5 jours, et ce matin j'ai l'impression de ne pas le reconnaître... Je pense pourtant l'avoir infusé pareil (ou presque), mais là j'ai un résultat complètement différent. Je n'y comprends plus rien :)
J'ai envie de dire : bienvenue au club...
Insondable mystère que ces thés japonais...Quand je pense que certains les trouvent monotones, ennuyeux, tous les mêmes...Non seulement la diversité est grande, entre terroirs et mode de fabrication, cultivars etc...mais un même thé recèle d'une infinité de surprises...
Je ressens les mêmes choses avec cet Asatsuyu en particulier, il est très polymorphe, polychrome...
Lionel, Finistère, 3è infusion d'un Sayamakaori dans la tasse de Petr...je croque une fleur...
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